L’Alliance écologique et sociale exprime son soutien à la mobilisation des paysan∙nes dans un contexte de cristallisation des colères contre la gestion de la crise de la dermatose nodulaire contagieuse bovine. La brutalité avec laquelle est menée la politique sanitaire du gouvernement, sans concertation ni construction commune avec les éleveurs et les éleveuses, sans suffisamment accompagner ces dernier∙es face aux pertes subies, est d’une grande violence. Elle met également en danger les agent∙es du ministère de l’Agriculture en première ligne pour la mettre en œuvre, et qui sont pris∙es pour cible de façon inacceptable.
L’Alliance écologique et sociale exige :
- Une réelle concertation avec les éleveurs et éleveuses sans privilégier un interlocuteur sur les autres.
- La protection par l’Etat des agent∙es du ministère de l’Agriculture.
- Un plan de transition sociale et écologique de l’agriculture et de l’alimentation.
Ce qui est en jeu dans cette crise n’est pas le respect ou non de normes sanitaires, nous réaffirmons que l’existence de ces normes est d’intérêt général. Mais nous dénonçons le fait que, dans le cas présent, le protocole alternatif pour éviter l’abattage systématique, soutenu notamment par la Confédération Paysanne, a été d’abord balayé d’un revers de la main par le gouvernement avant de faire l’objet de l’annonce d’un groupe de travail bien tardif et sans que soit levé le premier protocole. Ce protocole alternatif s’appuie sur la vaccination, qui permet l’abattage sélectif, et sur la surveillance renforcée du troupeau.
Or les 350 000 premières doses vaccinales proviennent de stocks européens d’urgence issus d’un laboratoire sud-africain. Depuis, ils sont commandés à flux tendu à un laboratoire du groupe Merck aux Pays-Bas. Un enjeu de souveraineté se pose sur la capacité de maîtriser la production des doses suffisantes en cas de propagation et de vaccination élargie en alternative à l’abattage total. Cela interroge également sur l’anticipation nécessaire pour gérer les futures épidémies qui se multiplient, dans l’intérêt de préserver les capacités productrices nécessaires à la souveraineté alimentaire de la France.
Pour le gouvernement et les dirigeants de la FNSEA, c’est en réalité de la préservation du modèle basé sur le libre échange qu’il s’agit principalement en s’accrochant à ce dispositif. Car pour préserver les intérêts de ce modèle, la France doit donner des gages qui passent par une application sans discernement des procédures d’abattage. En effet, le principal frein à la vaccination réside dans le fait qu’un territoire où la vaccination est mise en œuvre n’est plus considéré comme indemne ce qui ralentit le commerce. C’est le même modèle agricole qui pèse sur le dérèglement climatique, que subit en retour le monde agricole.
Pour les paysan∙nes, en plus de la perte du troupeau, l’abattage systématique anéantit leur travail et altère fortement les perspectives de poursuite de leur activité. Au-delà des exploitations directement touchées, la crise met au jour un sentiment que le monde paysan tout entier est à nouveau méprisé, que son travail n’a de valeur que lorsqu’il se fait sur le mode de la grande agriculture industrielle exportatrice.
Par ailleurs, cette crise intervient dans un contexte de démultiplication d’épizooties dont l’émergence et l’expansion sont largement provoquées par des ravages environnementaux qui font tomber une à une les barrières écologiques qui constituent des freins à de telles pathologies. La crise actuelle rappelle donc aussi l’urgence de la bifurcation globale de l’économie.
Nous nous tenons aujourd’hui aux côtés des paysan∙nes qui se battent avec la Confédération paysanne. Cette crise doit être l’occasion de repenser résolument le modèle agricole dans le sens de l’agroécologie paysanne.
GIRONDE