Les chiffres publiés par le ministère de la justice sont vertigineux et rejoignent ceux des années 2007-2014 *

Le nombre de mineur.es écroué.es a augmenté en un mois de 9,5%. De 743 mineur.es détenu.es au 1 er mars 2024, nous sommes passés à 831 à la date du 1er avril 2024. Quant au nombre d’écroué.es (détenu.es et sous écrou en aménagement), il passe de 817 à 895.
Il est à noter que le nombre de mineur.es en détention provisoire est aujourd’hui plus important que celui des condamné.e.es, alors que le CJPM devait permettre de diminuer la détention provisoire..Le SNPES-PJJ/FSU avait déjà dénoncé cette situation le 11 mars dernier (lien vers notre CP : https://snpespjj.fsu.fr/incarceration-des-mineur-es-chiffres-
inquietants-et-deni-de-notre-administration/), sans que cela ne soulève aucune réaction du garde des Sceaux ou de la direction de la PJJ. L’absence de réaction du ministère est un aveu flagrant de l’échec du CJPM.

Comment expliquer une telle hausse ?

✓ Les politiques pénales appliquées par les parquets sont devenues de plus en plus répressives. L’opération « Place nette », par exemple, a vu les parquets des juridictions concernées requérir plus fortement de la détention pour les mineur.es interpellé.es.

✓ Le Code de la Justice Pénale des Mineur.es n’apporte absolument pas les garanties, tant annoncées, pour éviter la détention. Bien au contraire. Et ce que nous avions déjà analysé dès le départ, c’est une augmentation des détentions
provisoires courtes qui banalisent l’incarcération. Les déclarations péremptoires du garde des Sceaux se félicitant du succès du CJPM en termes d’incarcération des mineur.es n’y changeront rien.

✓ Depuis la nomination d’Attal à la fonction de Premier ministre, cette augmentation a pris un tour vertigineux. Est-ce un hasard ?

Après le discours de Viry-Chatillon, nous constatons que nous sommes clairement face à une banalisation de l’enfermement des mineu.ers qui commence par les Centres Fermés et se finit, la plupart du temps, dans les quartiers mineurs et les EPM. Une des conséquences de cette situation est la détérioration des conditions de détention dans l’ensemble des EPM et certains QM. Dans un tel contexte, comment garantir l’accès aux droits pour ces jeunes (formation, santé et soins) ? Cette situation est aggravée par le climat politique actuel et les discours martiaux du gouvernement irrigués par une idéologie sécuritaire. C’est un recul majeur auquel nous sommes en train d’assister.

Malgré les contre-vérités assénées par le gouvernement notamment, il faut rappeler que :

• Non, les mineur.es ne sont pas de plus en plus délinquant.es et/ou de plus en plus tôt. De nombreux travaux le confirment : cf la tribune de V. Blanchard dans « le Monde ».
• Non, les parents en difficulté avec leurs enfants ne sont pas des irresponsables. Ils et elles ont besoin d’aide et de soutien et non d’être stigmatisé.es et voué.es aux gémonies.
• Non, ce qu’on appelle l’autorité ne fait pas défaut aujourd’hui. Ce sont les moyens donnés aux services. Les jeunes en difficulté ont besoin de la présence de professionnel.les formé.es, bienveillant.es, aidant.es et surtout en nombre. La
seule autorité défaillante aujourd’hui c’est celle de la DPJJ qui ne fait plus preuve d’autorité pour exiger des moyens pour les hébergements et les milieux ouverts pour abaisser les normes en milieu ouvert.
• Non, le retour des vielles antiennes comme la comparution immédiate ne fera pas baisser l’incarcération.
• Non, la suppression de l’excuse de minorité n’est pas l’idée du siècle non plus.
D’autant plus que cela contrevient au droit constitutionnel et à Convention Internationale des Droits de l’Enfant signée et ratifiée par la France. Rien que d’oser l’évoquer dans les perspectives est déjà purement scandaleux et inacceptable.

Dans cette fuite en avant autoritariste, le gouvernement veut déjà modifier le CJPM pour le rendre encore plus sécuritaire, alors que l’encre est à peine sèche. Les services de la PJJ, de la protection de l’enfance et de la prévention spécialisée ont pourtant besoin avant tout de moyens et de temps. Nous demandons à la DPJJ et au Ministère de la Justice que
s’instaure un dialogue concernant l’incarcération des mineur.es. Face aux contraintes budgétaires liées aux politiques d’austérité, les moyens substantiels actuellement fléchés sur le programme des 20 nouveaux CEF doivent être immédiatement réorientés vers les services éducatifs de la PJJ et du SAH.

Nous appelons l’ensemble des professionnel.les à se mettre en alerte face à la hausse de l’incarcération des mineur.e.s et à s’assurer de la garantie de leurs droits pendant leur incarcération. Nous les invitons à se servir du « Livret d’information du mineur incarcéré » édité par l’OIP avec la participation du SNPES-PJJ/FSU, du Syndicat des Avocats de France et du Syndicat de la Magistrature (Lien vers le livret : https://oip.org/publication/livret-dinformation-du-mineur-incarcere-edition-2024).

Faire le choix de l’éducation pour l’ensemble de la jeunesse ne doit pas être négociable !

*(https://www.justice.gouv.fr/documentation/etudes-et-statistiques/statistiques-
mensuelles-population detenue-ecrouee-0)